Usurpation de l'immatriculation d'un véhicule
Les « doublettes », des usurpations de plaques d’immatriculation, se multiplient. Une délinquance silencieuse qui laisse bien souvent les victimes sans recours.
Depuis deux ans, l’ANDEVI (Association Nationale de DEfense des Victimes d’Injustices) dénonce la facilité pour obtenir des plaques d’immatriculation sans fournir aucun document.
Début août 2011, une expérience de simulation de demande de plaques est effectuée par Daniel Merlet, président de l’ANDEVI, auprès de trois sites Internet (Immat’Express, Atout’Plaques et Plaque Immatriculation SIV). Le résultat est édifiant : aucun des sites ne demande de certificat d’immatriculation.
L’ANDEVI écrit à Claude Guéant, alors Ministre de l’Intérieur, pour l’alerter (voir la lettre dans les documents annexes). Jamais, il ne sera rendu réponse à ce courrier. En octobre 2012, dans un courrier adressé aux députés, l’ANDEVI demande aux parlementaires de légiférer rapidement et qu’un minimum de documents, tel que le certificat d’immatriculation, soit demandé par le vendeur de plaques d’immatriculation et fourni par l’acheteur. A ce jour, seulement une dizaine de députés ont répondu favorablement.
Se procurer de fausses plaques sur Internet ou en boutiques
Dernièrement, cette même expérience a été reprise par le magazine AutoPlus (numéro 1278, en kiosque jusqu'au 10 mars). Le journaliste est parvenu à copier les plaques de la Citroën DS5 de François Hollande. L'hebdomadaire a mené son enquête à la fois sur Internet et en boutique.
Sur les huit sites web spécialisés dans la délivrance de plaques d'immatriculation, seuls deux ont demandé des copies des papiers officiels, comme la carte grise, avant de fournir les plaques.
Ces sites, tous très bien référencés, sont toutefois dans les clous de la loi. Selon AutoPlus, et comme le dénonçait auparavant l’ANDEVI, « légalement, rien ne les oblige à réclamer des justificatifs ». Comme pour l’expérience menée par l’ANDEVI, AutoPlus a reçu de ces enseignes peu regardantes des plaques d'immatriculation en moins d’une semaine.
En boutique, les conditions d'obtention des plaques sont plus élevées. Garages, centres-autos, cordonneries, etc. : toutes demandent des justificatifs. Mais elles se montrent peu regardantes sur la fiabilité des documents fournis.
AutoPlus a en effet donné de faux justificatifs, grossièrement copiés, qui ont été acceptés sans difficulté dans la moitié des boutiques. C'est grâce à cette méthode qu'ils sont parvenus à obtenir la plaque d'immatriculation de la voiture de François Hollande avant de la placer sur un modèle identique.
Une souplesse qui illustre bien la hausse de l'usage de fausses plaques : en 2011, 20 296 amendes pour « doublettes » ont été recensées par les autorités. Un chiffre en constante progression puisque, l'année précédente, il s'élevait à 13 574, soit une hausse de 50% sur un an.
Une délinquance silencieuse et sans recours
Des milliers d'automobilistes rouleraient ainsi afin de faire envoyer leurs PV à d'autres. Cette nouvelle forme de délinquance est silencieuse et fait beaucoup de mal à ceux qui la subissent. L’usurpation de plaques d’immatriculation est une délinquance sans violence physique, mais ses conséquences peuvent être dramatiques.
L’ANDEVI compte parmi ses adhérents des personnes qui ont perdu des points, voire leur permis de conduire pour des infractions commises par ces escrocs. Cela va jusqu’à la saisie des comptes bancaires.
Or, pour ces personnes, déposer plainte auprès des gendarmeries et des commissariats de Police relève bien souvent d’une épreuve de force. L’ANDEVI dénonce la difficulté pour ces personnes à être simplement entendues, à tout niveau de la procédure. En effet les gendarmes ou les policiers répondent aux personnes, je cite : « Contestez auprès de l’officier du Ministère Public, en expliquant bien qu’il s’agit d’une erreur. Vous ne payez pas. »
Les personnes, souvent âgées, suivent leur conseil. Elles voient pourtant bien souvent leurs requêtes rejetées par les officiers du Ministère Public qui ne font que respecter le Code de Procédure Pénale. En orientant les victimes de la sorte, les gendarmes ou les policiers les induisent en erreur : ce sont eux qui devraient prendre les plaintes.
L’obligation de prendre les plaintes dans les textes
En effet, plusieurs textes stipulent qu’il est de la responsabilité de ces services d’enregistrer les plaintes pour infractions pénales. La loi du 15 juin 2000 instaure notamment le « guichet unique » en matière de dépôt de plainte auprès des services de police. De plus, une circulaire du 14 mai 2001 précise que le code de procédure pénale fait obligation à la police judiciaire de recevoir les plaintes des victimes d'infractions, y compris lorsque ces plaintes sont déposées dans un service territorialement incompétent, celui-ci étant alors tenu de les transmettre au service compétent.